Chasse à la bécassine en Tunisie
Traditionnellement, la chasse aux bécassines n’était pratiquée que par un petit groupe de chasseurs français vivant en Tunisie et notamment (presque exclusivement même) par un grand bécassinier, Jaques Lavau, que j’ai eu la chance de connaître et qui m’a aidé à améliorer ma façon de chasser, et m’a permis de goûter aux plaisirs de cette chasse sportive et enfin m’a conseillé pour l’acquisition d’une bibliothèque cynégétique comprenant tous les grands classiques.
Profitant de ce privilège et de cette pression de chasse quasi-inexistante sur ce noble gibier, il a été heureusement décidé au niveau des instances de tutelle du Ministère de l’Agriculture de ne pas donner en pâture ce gibier aux touristes ni à tout étranger non résident en Tunisie (à part, évidemment, les personnalités invitées par le gouvernement) ; ce qui fait que les bécassines trouvent dans notre pays des conditions idéales pour hiverner.
L’hivernage :
Les bécassines du Paléarctique occidental qui viennent hiverner en Tunisie, arrivent début septembre ou exceptionnellement fin août. J’ai constaté une fois, cette migration alors que j’aménageais un marais situé à 20 km de Tabarka au bord de la mer. C’était le 23 août, et j’ai pu voir un vol de 15 oiseaux. Les sourdes arrivent un peu plus tard et repartent plus tôt.
Les zones favorables :
Les grands marécages ont, hélas, disparus : la plaine du lac Ichkeul devenue zone humide internationale et la plaine de Bullaredjia au nord-ouest, qui aujourd’hui est entièrement drainée. Il en reste heureusement encore : l’énumération serait fastidieuse, il faut quand même Bizerte, les marais d’El Alia et Utique et un peu plus au sud ceux de Friga, Dekhva, Oued Zarga et Maagoula. Au nord-est du pays, deux marécages, Eloudrenne et Soliman, sont bons en fin de saison (fin février, début mars). Au centre de la Tunisie, on rencontre les zones humides suivantes : Le Krib, Dahmani et Mebasta. Il y a aussi, dans l’extrême sud au delà du Chott al Djérid, un grand marécage, avec une bonne végétation de phragmites bien pâturés par les camélidés. Il y a là de très grosses concentrations de bécassines en octobre et novembre. L’alimentation en eau de cette zone est assurée par des puits artésiens.
Les modes de chasse :
En battue : Nous ne chassons en battue que sur deux marécages : Bouterfes et Bouramada. Nous utilisons quatre rabatteurs. La difficulté réside à tirer des oiseaux très rasants qui ont une vitesse exponentielle depuis leur envol devant les rabatteurs, lesquels observent un silence absolu. Comme nous ne sommes que deux tireurs et vu la largeur et la longueur du marais, nous sommes postés à plus de 200 mètres l’un de l’autre. La battue terminée, nous lâchons les retrievers. Quelle joie quand aucun oiseau n’est perdu.
Devant soi : Par chance, nous avons une telle diversité de végétation qui couvre les autres marécages qu’il n’y a aucune monotonie du terrain et aucun tir ne ressemble à l’autre. Jonc, phragmites, roseaux, lauriers roses, tamaris, cette végétation assez haute pousse dans des terrains salés. Des terrains qui sont également gluants et qui vous font suer sang et eau. Au bout de deux heures, les ratés s’amplifient tellement, qu’on finit par mettre en doute son aptitude à tirer, surtout si les oiseaux partent de tous cotés sans qu’on les voit démarrer. Mais c’est quand même un régal incommensurable !
Les bécassines doubles : Je voudrais juste conclure par un mot sur les doubles qui arrivent fin janvier et repartent fin mars. Personnellement dans toute ma carrière je n’en ai capturés que 8 dont 3 la même saison, en 1995. Un ornithologue du nom de Petitclerc, a rédigé en 1925 un petit précis dans lequel il raconte qu’il a tué 80 bécassines doubles en Tunisie, à 65 km de Tunis, dans la région de Mateur.
Hamadi Khaled Administrateur du CICB
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